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Rencontre avec Adeline Hazan, contrôleur général des lieux de privation de liberté

Le 16 mars dernier, les étudiants du Master 2 de Criminologie ont eu le privilège d’accueillir Adeline Hazan, ancienne étudiante de l’institut de criminologie de Paris 2, magistrate de formation, ancienne députée européenne et maire de Reims, et aujourd’hui contrôleur général des lieux de privation de liberté depuis juillet 2014.

Institué par le législateur en 2007, le CGLPL se voit conférer le statut d’autorité administrative indépendante. Le contrôleur général est nommé pour une durée de six ans sans renouvellement, et est assisté d’un secrétaire général, d’une équipe administrative, d’une quarantaine de contrôleurs placés sous son autorité et de sept juristes en charge des sollicitations. Les sollicitations, plus de 4000 par an en moyenne, peuvent émaner des détenus, des patients ou même des professionnels de la psychiatrie.

Le contrôleur général peut visiter à tout moment, sur l’ensemble du territoire français, tout lieu où des personnes sont privées de leur liberté. Il s’agit notamment des établissements pénitentiaires, comme les maisons d’arrêt ou centres pénitentiaires, des établissements de santé, des locaux de garde à vue, des centres éducatifs fermés ou encore des centres de rétention administrative des étrangers. Sont ainsi visités environ 150 établissements par an : les contrôleurs sont en immersion totale, et l’équipe pluridisciplinaire comprend des magistrats, commissaires de police, ou agents pénitentiaires. Elle est systématiquement composée de professionnels qui connaissent le lieu dont ils ont la charge de contrôler.

Il ne s’agit pas de vérifier l’application de la loi, mais plutôt de s’assurer d’une application conforme de cette loi aux droits fondamentaux. Pour se faire, le CGLPL appréciera les cas de privations de liberté au regard d’un corpus de textes prédéterminé par ses soins et consacrant ces droits fondamentaux. Sa mission consiste donc à vérifier que les restrictions à ces droits soient proportionnées à l’impératif de sécurité.

A la suite d’une visite, un rapport est transmis au ministre de tutelle dudit établissement, l’informant des observations faites et de la condition des personnes privées de liberté. Dans les hypothèses d’une « violation grave des droits fondamentaux d’une personne privée de liberté », le contrôleur général peut recourir aux recommandations en urgence avec publication au JO. Ce fut notamment le cas le 14 décembre 2016 au sujet de la maison d’arrêt des hommes du centre pénitentiaire de Fresnes, ou du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne le 1er mars 2018. L’effet est immédiat puisque le ministre de tutelle doit alors donner des instructions pour que cette violation grave cesse. Si le CGLPL ne dispose aucunement d’un pouvoir d’injonction, il dispose du pouvoir d’alerte et de recommandation. 

En 2017, les trois principaux domaines d’actions du CGLPL étaient la prison, la psychiatrie et l’immigration. Ces trois sujets sont aussi au cœur des prochaines tentatives de réforme, mais Mme A. Hazan souhaite faire de la psychiatrie une priorité de son mandat.

Les étudiants ont pu également s’intéresser à la difficile approche sociale et sociétale de la prison, de la surpopulation carcérale et de la réinsertion des prisonniers. Une particulière attention a été portée aux maisons d’arrêt, mais également à la difficile condition des femmes incarcérées. A la question des solutions aux maux des établissements pénitentiaires, Mme A. Hazan et les étudiants ont pu aborder trois grands axes de réflexions : le sens de la peine, la prison comme l’ultima ratio, et enfin une politique de régulation carcérale pour désengorger les prisons.

Enfin, d’autres thématiques bien plus larges ont pu être abordées comme l’utilisation des téléphones portables en prison (Mme Hazan étant à ce propos favorable à la mise en place des téléphones portables bridés), des fouilles à nu en prison, du projet de loi Asile et Immigration alors présenté au Conseil des ministres le 21 février 2018, de la rétention des mineurs, et de la situation alarmante des centres éducatifs fermés.

Les étudiants du Master 2 tiennent à remercier Madame Hazan pour nous avoir fait part de son expérience et nous avoir consacré ce chaleureux temps d’échange.

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